Je suis loin d'avoir encore tout lu, mais voici mes premières impressions de lecture, dans l'ordre des pages :
- Les premières pages avec les interviews et la présentation du loisir, imprimées en blanc sur fond noir, sont en plus écrites tout petit. Ce n'est pas très pratique à lire. La suite, sur fond blanc, est beaucoup plus lisible, mais, et je vais avoir l'air jamais content en disant ça, le texte avait l'air imprimé... en trop grand ! Je ne lis pas le magazine d'habitude, donc je ne sais pas si c'est habituel. Ça donne l'impression que les interviews ont été tassées au maximum tandis que le reste fait un peu délayé.
- Les interviews des auteurs et autrices du hors-série m'ont un peu étonné par leur place : je les aurais plutôt vues à la fin du numéro qu'au tout début. Je ne dois pas être dans l'
ego trip de l'époque actuelle, mais je m'attendais plus à lire... le jeu. Cet étonnement passé, elles sont intéressantes, mais m'ont intéressé davantage en tant qu'auteur de jeu (l'interview de Girl Dot Game), fan de Mnémos/Multisim de longue date (celle de Frédéric Weil), ou parce qu'il y a un portrait de rôlistes des jeunes générations (Roxane Touret, Sarah Plasse). La présence d'une interview de Jaworski m'a paru incongrue. J'aime bien ce qu'il fait, mais il n'est ni l'un des auteurs adaptés, ni un entretien spécialement voué à présenter le jeu de rôle ou à donner des conseils. J'ai l'impression que les auteurs l'ont casé là en se disant que ça ferait vendre le numéro. Ou alors j'ai mal compris le principe du hors-série et il y a une partie du magazine qui contient des rubriques habituelles plutôt que de consacrer l'ensemble des pages au sujet spécifique du hors-série.
- La présentation du concept de jeu de rôle par Girl Dot Game : on entre enfin dans le vif du sujet, et cette présentation du loisir m'a paru très bien, le premier mot qui m'est venu à l'esprit en la terminant est : "motivante". Ça donne envie, ça met en confiance et ça donne quelques conseils de base comme il faut. (Et ça me donne envie d'aller visiter sa chaîne Youtube.)
- Les règles du jeu : on a donc une variante de
Simulacres très, très, très (très) simplifiée. Gros avantage pour un magazine vendu en kiosques, puisque ça peut vraiment intéresser un public très large. Personnellement, je n'ai jamais été très fan de Simulacres, qui m'avait complètement dérouté quand je l'avais découvert en 1997 au temps où je découvrais le jdr, mais au moins, cette version-là, je l'ai comprise dès la première lecture, donc le travail de clarification a vraiment été fait. Ce système (qui tient en 9 pages écrites en grand avec 1 page d'exemple de combat) pourra frustrer les rôlistes aguerris, mais ils ne sont pas le public.
Le système a l'air de pouvoir bien marcher avec un large public de débutant-e-s. Je dois tout de même dire que, si je ne connaissais pas le jdr, que je feuilletais un magazine et que je tombais sur la phrase "Les Moyens sont les modes de mise en œuvre des Composantes" (p. 25), je serais refroidi direct. Ajoutons que le tableau des exemples de combinaisons Composantes/Moyens en page 28 ne montre pas leurs noms mais seulement les icônes correspondantes, ce qui demande déjà un peu de gymnastique mentale pour mémoriser les icônes alors qu'il y aurait eu la place de mettre les deux (quitte à imprimer les noms aussi petit que dans les pages d'interviews...), histoire de faciliter vraiment la tâche aux MJ qui débutent.
- Les univers sont sympathiques, mais très, très, très brièvement décrits. L'univers de Panam, c'est deux pages de texte et 1 page d'illustrations. Le parti a visiblement été pris de réserver un maximum de place aux scénarios. Pour en avoir lu un, ils prennent bien le/la MJ par la main, avec des textes à lire au groupe. Mais un univers si brièvement décrit va-t-il donner au/à la MJ assez de billes pour se l'approprier, ou même pour le comprendre ? Dans ce cas, comment improviser ? Sans parler de créer leurs propres scénarios (chose prévue dans le supplément numérique). Le hors-série met l'accent sur l'idée d'avoir plusieurs aventures à jouer faciles à mettre en place, mais n'assure pas une grande rejouabilité (du moins pas avec une même tablée). Ça semble être un parti pris, ce qui explique aussi l'absence de règles de créations de persos dans le projet initial.
- Les pages des feuilles de persos sont superbes : illustrations allant du correct au très beau, pas trop de texte, mise en page jolie et sobre pour rester bien lisible : ça donne directement envie de jouer. Elles incluent une petite progression, avec des capacités qui se débloquent quand le personnage joue un deuxième puis un troisième scénario.
- Coquille repérée : dans le plan du scénario 1 de Panam à la page 46, le n°3 de la légende (le bâtiment des serviteurs) manque sur le plan.
- Le scénario 1 de Panam ne forme pas une intrigue complète, mais plutôt une première partie. Il ne s'agit donc pas de trois scénarios, mais plutôt d'un scénario découpé en deux ou trois parties. Le découpage n'est pas absurde, surtout quand on débute : il peut aider à garder les parties courtes, et donner un côté feuilleton. Mais la mention "3 scénarios" est un peu exagérée.
- Après lecture du scénario 1, les situations et personnages sont intéressants, mais le tout fait très "toboggan". Il n'y a aucune indication sur plusieurs possibilités différentes selon les actions des PJ. Un ou une MJ débutante risque d'être facilement désarçonnée si les PJ prennent une décision inattendue. Le scénario semble même à vrai dire pouvoir se dérouler à l'identique quoi que les PJ fassent, et ne les met pas en position de faire des choix qui auraient vraiment une influence sur la suite. C'est peut-être délibéré, puisque c'est censé être un tout premier scénario, pour leur laisser le temps de se familiariser avec le principe du jeu de rôle, les jets de dés, etc. J'espère que la suite est moins linéaire. Je ne l'ai pas encore lue.
Exemple :
Encore une fois, je n'ai lu qu'un des 9 scénarios, sans parler des trois scénarios en 45 minutes débloqués pendant la campagne de foulancement, donc ce qui concerne le scénario sera sûrement à nuancer après lecture du reste.
- Après premier feuilletage, je n'ai pas pu m'empêcher de repenser au hors-série
BaSIC de Casus Belli qui m'avait fait découvrir le jeu de rôle en 1997. Je me suis un peu laissé emporter à écrire, mais voici une petite comparaison pour voir les différentes d'approche entre les deux HS à 26 ans d'écart :
* Le hors-série de
Geek magazine :
- présente l'avantage d'être extrêmement grand public : très peu de paramètres chiffrés, très peu de texte à lire.
- nécessite une mise en place minimale pour se lancer (textes à lire à la table).
- Le système de jeu est extrêmement simple. Je ne sais pas s'il risque d'effaroucher des gens (les Moyens et les Composantes, encore...) ; en tout cas, le nombre de paramètres chiffrés a été réduit au maximum.
- Naturellement ce hors-série a aussi l'avantage d'être tout en couleurs, c'est devenu un minimum de nos jours.
- Il est également très bon pour faire le lien entre le jdr et la lecture, en mettant l'accent sur des univers communs aux deux supports.
- Mais il contient peu ou pas de références à de grands univers de l'imaginaire ou à des œuvres ou franchises célèbres qui permettraient de se faire rapidement une idée de tel ou tel univers. Exemple : parler d'un mélange entre Jules Verne et Tolkien aurait pu rendre plus claire la description de l'univers
steampunk ; l'univers du Bleu-Royaume est présenté de manière assez vague via une définition du médiéval-fantastique tiré du GROG (?), alors que parler d'une ambiance quelque part entre les histoires de chevaliers, les
Trois Mousquetaires et
Game of Thrones aurait peut-être été plus parlant.
- Il est moins complet et autonome : on aura tout de même vite besoin de lire les romans pour se faire une bonne idée des univers présentés (il y a clairement un côté "produit d'appel"), et/ou de passer à un vrai jeu du commerce pour vivre plus d'aventures.
- Le lien avec Internet et le jeu à distance actuel est logiquement bien meilleur grâce aux accessoires en numérique (plans, illustrations, pions des PJ) mais au temps de BaSIC l'Internet grand public était encore balbutiant.
* Le hors-série
BaSIC est...
- ... plus court (106 pages contre 128 pour le
Geek magazine).
- ... beaucoup plus dense en texte : tout est écrit aussi petit que dans les premières pages du Geek magazine... mais en noir sur blanc, donc en plus lisible.
- ... plus sobre puisque en trois couleurs (noir et blanc + titres et marges en turquoise, bleu ou gris, distinguant les trois parties : règles, univers med-fan et univers paranormal).
- ... beaucoup plus riche en illustrations originales, entre les illustrations pleines pages, les schémas et les Crapougnats. C'est vraiment très frappant.
- ... plus amusant grâce aux multiples petits dessins humoristiques (Crapougnats mais pas que) qui font passer les règles plus complexes.
- ... plus complexe à prendre en main en termes de paramètres chiffrés, plus nombreux et basés sur plusieurs échelles (c'est du BRP, donc il y a du 3d6 pour les caractéristiques et des pourcentages pour les compétences).
- ... clairement moins grand public dans la mesure où il nécessite plus de lecture et plus d'aisance avec les paramètres chiffrés.
- ... moins varié dans ses univers (deux, contre trois pour
Geek magazine).
- ... plus détaillé dans ses univers (14 pages + 1 illustration pleine page pour l'univers med-fan de Danae, par exemple).
- ... plus complet dans sa présentation du jeu de rôle : double page dessinée avec schéma d'une partie en cours, réponse à des questions fréquentes pour situer le jdr par rapport aux autres loisirs. Il a encore des leçons à donner aux jeux d'initiation actuels. Par exemple, Geek magazine aurait pu situer le jdr par rapport aux jeux vidéo de rôle ou aux
escape games. Girl Dot Game donne toutefois des informations de base tout à fait utiles pour commencer et indique bien les similarités et différences par rapport aux actual plays par exemple. On trouve aussi, à la fin, un article présentant les principaux jeux du commerce classés par genres. Aussi bizarre que ça paraisse,
Geek magazine ne renvoie même pas aux autres jeux utilisant le système de
Simulacres. Un effort de non-auto-promo digne des
Incorruptibles !
- ... plus utile aux MJ qui débutent, grâce au chapitre de conseils au MJ qui me paraît être la vraie lacune du hors-série
Geek magazine.
BaSIC contient aussi un article pour créer des scénarios (dispo seulement en numérique pour le Geek magazine), un autre pour créer une campagne, une aide de jeu pour convertir les scénarios d'autres jeux de rôle à
BaSIC et deux pages d'inspirations (livres, BD, films...).
- ... peut-être un peu moins cher : 45 francs de l'époque contre quasi 15 euros pour
Geek magazine. Mais il y aurait plusieurs paramètres à prendre en compte pour que cette comparaison ait réellement du sens (inflation, usage de la couleur, tirage...).
- ... plus suranné dans la couverture, avec ce personnage de femme aux seins quasi nus que j'avais complètement oublié -_- (Bizarrement, même quand j'étais ado et plein d'hormones, je n'ai jamais vraiment remarqué ce détail, plus intéressé par l'équipement futuriste de la dame et par l'ankh qu'elle brandit.) Pas très fan de la couverture de
Geek magazine non plus, mais au moins elle n'a pas ce problème et on peut la mettre entre toutes les mains, tous âges confondus.
Ping à
@Welgan et
@Franck XII S
EDIT le 22 pour virer des phôtes et bouts de phrases bancals et ajouter un exemple du côté toboggan du scénario que j'ai lu.