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Critiques de Jeu, Comptes rendus et retour d'expérience
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Brand
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Message par Brand »

C'est vraiment un des aspects qui m'ont aussi séduit sur ce jeu.
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Czevak
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Re: Critiques

Message par Czevak »

merci, Steve J, pour tes explications très claires.
J'avais lu le jeu. Son créateur avait laissé accessibles - très sympathiquement - ses différentes versions, jusqu'à la finale.
J'avais bien saisi comment les pouvoirs étaient classés par catégories mais je n'avais pas compris ce que tu dis par rapport à la narration, qui est en effet, bien trouvé.

J'ai vu également une review qui dit qu'il manquerait des moves http://www.noordinaryobsession.com/2015 ... lds-peril/ ???

Finalement, est-ce que tu as une préférence par rapport aux concurrents, par exemple, Masks ou Just Heroes (New Gods for an Old Town) ?
anonyme
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Message par anonyme »

Ca a l'air pas mal du tout... mais une traduction en français serait la bienvenue.
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KamiSeiTo
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Re: Critiques

Message par KamiSeiTo »

@Steve J : question naïve, est-ce que le nombre -forcément réduit- de playbooks ne limite-t-il pas le nombre possible de héros créables, celui-ci étant habituellement vertigineux dans le genre super-héroïque ?

Et sinon, aucune envie de traduction en français de manifestée (par un éditeur plus classique ou par un truc genre la caravelle de 500 Nuances de Geek)?
Proposer un jeu qui soit au service d’une façon de jouer spécifique et, surtout sans tomber dans le piège de ne pas en permettre d’autre, néanmoins tout inféoder à cette dernière.
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Steve J
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Re: Critiques

Message par Steve J »

A ma connaissance pas de traduction annoncée ce qui est bien dommage. Je suppose que le combo Super-Héros+Apocalypse System place le jeu au fond d'une niche.

Sur les playbooks et les Moves : je trouve que ni les premiers, ni les seconds ne sont en sous-nombre.
Les playbooks étant divisés entre les origines et les motivations on créé son personnage en choisissant une combinaison ce qui multiplie les possibilités. Mais plus fondamentalement la logique freeform des pouvoirs permet une grande liberté de création et je peine à voir un héros "classique" qui ne soit pas émulable avec ce système.
Pour les Moves je ne vois pas tellement le problème avec le Move "Defy Danger" qui a fait ses preuves dans Dungeon World (globalement je trouve au contraire les Moves un peu mieux conçus que dans la première version d'Apocalypse World). Il n'y a effectivement qu'un Move social (cependant associé à une "jauge" de relation qui a un usage assez important en jeu) mais cela correspond aussi à une volonté de ne pas focaliser le jeu là-dessus (on est pas dans Monsterhearts).

Je ne connaissais pas Just Heros et me suis contenté de lire rapidement Masks.
Pour comparer ce dernier avec Worlds in Peril je dirai qu'il y a une différence de thématique : Masks est orienté drama avec des personnages adolescents. La présence des super-pouvoirs est une métaphore du passage à l'âge adulte et de l'obtention de nouvelles responsabilités. Pour le coup le jeu contient des Moves sociaux qui ont pour objectif de simuler l'instabilité émotionnelle des PJs.
Worlds in Peril est d'abord un jeu d'action et de défis ludiques : on va chercher à se débarrasser d'une menace qui pèse sur le monde. Il peut y avoir du drama mais il sera secondaire par rapport aux stratégies que les joueurs élaboreront pour éviter que Xzormax le Tout-Puissant ne détruise le monde.
Fan des hacks d'Apocalypse World qui commencent par la lettre "W" : Worlds in Peril, World Wide Wrestling RPG
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Macbesse
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Re: Critiques

Message par Macbesse »

Steve J a écrit :@Czevak
Je peux détailler mais il me semble assez normal que la discussion ne soit pas aisément compréhensible sans avoir lu le jeu. Les discussions que tu cites portent sur la gestion des pouvoirs qui est particulière mais ingénieuse.
Expliquons !

Contrairement à ce qu'on pourrait imaginer, les pouvoirs ne sont pas associés à un Move.
Si on se contente de regarder le système de façon abstraite (i.e. sans se préoccuper de la fiction que l'on est en train de raconter), déclencher le Move
"Abattre une opposition" aura les mêmes conséquences technique selon que l'on attaque l'ennemi à mains nues ou avec un pouvoir créant une tornade. De même "Défier le danger" fonctionne de la même façon si on décrit que l'on vole vers l'ennemi alors qu'il est en train de mitrailler dans notre direction, ou que l'on décrit comme on plonge dans les égouts pour éviter un rayon de la mort.

Sauf que, bien évidemment, avoir un pouvoir va permettre de justifier narrativement que l'on déclenche un Move.
Si je possède un pouvoir de vol je vais pouvoir déclencher le Move "Abattre une opposition" en décrivant comment je fonce vers l'hélicoptère et lui assène un coup de poing. Si je n'ai pas de pouvoir de vol il va falloir trouver autre chose (un autre Move ou une autre justification).
De même si je possède un pouvoir de lecture dans les pensées+un pouvoir de vol je vais pouvoir expliquer au MJ comment je vol autour de l'immeuble où a eu lieu le crime, en scannant les habitants par la fenêtre pour les transformer en témoins à leur insu. Cela me permettra de déclencher le Move "Récolter des infos".

Sur la feuille de perso on note un certain nombre de pouvoirs. Ces derniers sont classés par catégories qui sont en fait des indications d'à quel point il est justifiable narrativement d'intégrer un pouvoir.
Si j'ai mis Vol [simple] je n'aurai jamais de problème à utiliser de pouvoir de vol. Si j'ai mis Vol [difficile] il va falloir que j'explique comment je me concentre avant de me mettre à décoller (le MJ pourra alors trouver abusé que j'utilise un combo Vol+télépathie). Si j'ai mis Vol [borderline] il faudra vraiment une situation dramatique pour que je puisse décrire comment je vol (genre mon petit ami est en danger et, sans m'en rendre compte et sous l'effet de l'adrénaline, je parviens à utiliser mon pouvoir de vol en me ruant sur lui).
Waaaa, c'est brillant.
Les thématiques de SH me laissent toujours aussi froid, mais il faut bien reconnaître que c'est ingénieux.

Et j'ai beaucoup ri (jaune) en lisant ta critique de INS / MV Génération perdue.
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Czevak
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Message par Czevak »

pour les gens qui aiment bien les exemples et la série Daredevil, https://giochiattornoalfuoco.wordpress. ... daredevil/
(j'ai utilisé google translate)
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Yoichi Hiruma
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Re: Critiques

Message par Yoichi Hiruma »

Quand une discussion s'éternise dans le fil Critiques, il est souvent bon d'ouvrir un fil spécifique pour en parler. Ici, on devrait trouver quasi-exclusivement des Critiques ;)
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Soner Du
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Re: Critiques

Message par Soner Du »

Critique du Reference Rules Compendium pour Delving Deeper
(bientôt sur le GROG : note 5/5)

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Quel est le rétroclone le plus fidèle de la “boîte blanche” (ou boîte marron), la toute première édition de Donjons & Dragons ? La question ne peut pas avoir de réponse sûre, puisque déjà au départ cette fameuse boîte avait une identité floue, incluant notamment deux systèmes de combat, le système principal hérité de Chainmail, se jouant avec 2d6, et le “système alternatif” joué au d20, qui deviendra finalement le système que nous connaissons encore aujourd’hui, à quelques nuances près… Il n’y a donc pas forcément de raison de considérer moins légitimes les clones favorisant l’héritage Chainmail au d6, tel Spellcraft & Swordplay ou Épées & Sorcellerie, par rapport aux clones favorisant le “système alternatif” au d20, tels Swords & Wizardry WhiteBox ou Delving Deeper...

Donc voilà, Delving Deeper a fait le choix de regarder vers l’avenir (du passé) et de simuler le système alternatif. Quelles sont donc les différences avec S&W WhiteBox qui a le même postulat ? C’est certainement Delving Deeper qui a la plus forte volonté de simuler à quoi pouvait ressembler une partie de Donjons & Dragons en 1974, sans avoir de connaissance de ce qui paraîtrait plus tard. En comparaison, S&W WhiteBox n’hésite pas à puiser dans de nombreux postulats “modernes” qui n’existaient pas en 1974 : clercs sans grimoire, classe d’armure croissante (facultative certes), disparition des tables de trésors aléatoire, etc. Je dirais que S&W WhiteBox essaie de reproduire la boîte blanche en simplifiant le d20 System à outrance, alors que Delving Deeper tente de reproduire la boîte blanche et ses errata, avec pour seule concession à la modernité la volonté d’être clair et exhaustif… Au final les résultats sont semblables, mais sensiblement différents sur de nombreux détails et dans le ton.

Delving Deeper fait donc la synthèse de toutes les impressions de la boîte blanche en faisant des choix entre leurs subtiles différences, des errata et FAQ, prioritairement celles de Gary Gygax, et de quelques éléments issus de diverses parutions de 1974, le tout en tentant de rester dans les clous de l’OGL. Le résultat est remarquable, on a presque l’impression de découvrir un autre univers que le standard “donjonesque” actuel, avec plus d’inspiration SF (robots, androïdes…), pas encore trop de créatures spécifiques à Donjons & Dragons, des contrées parsemées de forteresses dont les seigneurs ont tous l’intention d’exploiter les aventuriers… Les tables de rencontres frôlent régulièrement le surréalisme, comme la probabilité non-négligeable de croiser un troupeau de diplodocus au fin fond d’un donjon, ou l’apparition en plein ciel de pirates chevauchant des ptérodactyles… et certains points de règles sont même de potentiels prétextes d’aventure, comme les fâcheries suite à l’héritage d’un personnage décédé.

Les règles sont expliquées très clairement, sans ambiguïtés, et référencées à tous les endroits où elles sont utilisées. La présentation est claire et lisible, dans un style sobre où pointe parfois un humour sous-jacent. Les quelques règles rajoutées l’ont été pour combler d’éventuels manques, ainsi la classe de voleur (issue d’un zine de l’époque) est en grande partie là pour savoir quoi faire des halfelins, nains et elfes arrivé à leur plafond d’évolution. Les vraies modifications sont mineures : la table de combat est unifiée et lissée, le “principe jet haut = succès” s’applique même aux jets de d6… On est essentiellement dans du OD&D archaïque, compilé et clarifié.

Bref, un excellent travail de réécriture intelligente, et de compilation. Gratuitement ou imprimé à prix coûtant, avec une couverture sympa et un trio d’illustrations pleine page, c’est une lecture indispensable à tous les curieux et ceux qui désirent vraiment jouer comme en 1974 !
ypikaye
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Re: Critiques

Message par ypikaye »

Qu’il est beau mon Other Worlds !

Évacuons tout malentendu, Other Worlds est un jeu de niche ou du moins réservé à une gamme particulière de joueurs et de maîtres de jeu. Il se classe dans la catégorie des systèmes de jeu type boîte à outils, renforçant la narration et l’interaction à l’aide de règles simples, intuitives et rapides. Il propose une mécanique sans univers, s'adressant aux créateurs ou conversionnistes de tout poil.

Donc Other Worlds regarde du côté d’Heroquest et de Fate plutôt que de Gurps ou de D&D. Il privilégie la narration, l’action cinématique, l’imaginaire des joueurs et du MJ, l’interaction entre les joueurs et l’improvisation « organisée » (un concept avancé ... je sais).

Personnellement j'aime beaucoup Other Worlds. Je le maîtrise depuis plusieurs années, plutôt ponctuellement, sur du pulp/Horreur/Bob "Moranesque". Trois points forts à mon sens ressortent de ce système.

1) - LA CREATION DE PERSONNAGES JOUEUR, NON JOUEUR.

Other Worlds propose ainsi une création de personnage (PJ ou PnJ) innovante, simple et dont le résultat final est lisible et précis. Le principe de création s’appuie sur des « templates » - disons des « modèles » - au nombre de 3 plus 1 « template/modèle » destiné aux pouvoirs en tout genre.

Les trois premiers modèles segmentent la définition d’un personnage à partir des concepts de culture, profession et individualité. Chacun des modèles est construit à partir de 8 descriptions générales, 4 descriptions de personnalité, et 4 descriptions relationnelles.

Donc au total nous avons un personnage défini par 24 descriptions générales, 12 descriptions relationnelles et 12 descriptions de personnalités. A ce niveau de création aucun personnage ne peut se ressembler vraiment et surtout obtient une épaisseur inégalée. A cela vient s’ajouter pour les univers de jeu incluant des pouvoirs, un quatrième modèle dit « de signature » qui émule un objet, une magie, un pouvoir, une aide hors normes telle une armure de combat spéciale, un pouvoir psychique ou magique, un véhicule particulier, etc.

Parachevant le tout, des objectifs et des désavantages sont ajoutés au modèle « individualité ».
L’ensemble de la création est totalement narrative. Bien entendu nombre de modèles sont fournis comme source d’inspiration et gageons que d’autres verront le jour sur la toile.

En tous les cas, le découpage en trois ou quatre modèles thématiques permet de conduire le processus de création de manière très cohérente sans être enfermé dans un quelconque corset composé de classes de personnages. Le triptyque des étapes de création - Culture/Profession/Individualité - facilite grandement l’approche du personnage. L’organisation en 8 entrées générales, 4 entrées personnelles et 4 relationnelles cadre le processus tout en laissant une totale liberté à l’inventivité. A l’instar de Fate ou Heroquest, toutes ces descriptions sont autant de capacités se définissant à partir de phrases et de concepts et qui serviront à motoriser les actions durant le jeu.

Une fois les modèles renseignés - soit au début du jeu, soit complétés en cours de partie - des scores sont attribués à chaque capacités de chaque modèles en fonction du niveau de réalisme voulu ou de puissance de l’univers ou encore du pouvoir attendu. Ces niveaux vont de 10 à 50.
  • > 10 = niveau du commun des mortels (équivalent nv 1 à 2 pour D&D)
    > 20 = niveau réaliste (équivalent nv 3 à 5 pour D&D)
    > 30 = niveau Action (équivalent nv 6 à 10 pour D&D)
    > 40 = niveau Héroïque (équivalent nv 11 à 14 pour D&D)
    > 50 = niveau Légendaire (équivalent nv 15 à 20 pour D&D)
une fois les niveaux attribués à toutes les capacités l’on doit répartir des niveaux de scores différents dans chacun des modèles. En résumé, chaque modèle possède une capacité à + 5 par rapport au niveau initial. Le modèle « individualité » possède également une capacité à +10 et une autre à -10, deux autres à + 5 et deux autres à -5. Cela permet donc de différencier les personnages et de leur conférer des spécialités par rapport au niveau de base de l’univers (10 à 50).
Il est possible de différencier bien entendu les niveaux de base. Ainsi prenons un univers classique et réaliste de base 20. Les modèles auront donc des capacités à 20 avant répartition des +5,+10,-5,-10 sur certaines capacités et modèles. En revanche le modèle « signature » représentant les aspects hors normes ou spéciaux du personnage, peut partir sur un niveau de base supérieur ou inférieur.
Prenons l’exemple d’une adaptation des armes dieux de Bloodlust. Ces dernières peuvent être mineures ou majeures. Dans un univers de fantasy sobre sans trop de monstres à chaque coin et dont les adversaires sont plus souvent humains (prendragon, conan etc ...) le niveau sera de 10 ou de 20. Mais le modèle « signatures » de l’arme-dieu sera plus élevé. Par exemple 30 pour les armes-dieux majeures ; les armes mineures resteront à 20 mais apporteront de toute façon des capacités supplémentaires.
Ce système s’adapte donc facilement à tous les univers.

J’aime particulièrement l’équilibre du processus de création. Un cadre simple mais organisé tout en étant couplé à une liberté totale. Le système offre par ailleurs moult conseils pour éviter les capacités à la description trop vague sans l’interdire car les modificateurs de difficulté tiennent compte de la précision de la description. Par exemple un joueur combattant avec une épée courte en utilisant sa capacité « arme de mêlée à 20 » sera logiquement frappé d’un -10 car sa description est très général. En revanche celui qui aura « Combat à l’épée » ne subira pas de malus ni bonus ; celui qui aura « Pratique de l’épée courte » recevra un +10 et celui qui aura « Expert avec une épée courte forgée en acier kirdurien » et possédant une telle épée recevra un +20.

Au delà de ce cadre un joueur sans grande imagination à la création de son personnage peut tout de même entrer en jeu sans avoir compléter la procédure de création et composer son rôle tout au long de la partie, notant au fil de l’eau, les capacités qu’il a souhaité donner à son personnage.

La force de ce type de système « light » est d’ouvrir les vannes de l’imagination tout en laissant le choix des sources de création : une image ou plusieurs pour conceptualiser son personnage (comme pour Everway par exemple), une table de création aléatoire, un échange narratif avec le MJ ou entre joueurs, une classe de personnage piochée dans un autre JdR, un archétype de film/série/BD/Roman, etc.

2) - LA GESTION DES CONFLITS

Autre force du système : la résolution des conflits. Un conflit étant entendu au sens le plus large possible selon l’idée force de l’opposition entre plusieurs concepts dont les objectifs divergent.

Dans une situation de conflit le PJ/PnJ choisi une capacité en correspondance avec la méthode de résolution du conflit. Le score de cette capacité sera ajouté à un jet de D100. Rien de nouveau, certes. La subtilité provient de la possibilité d’ajouter une seconde capacité pour moité de son score, une troisième et une quatrième pour 10% de leur score. Bien entendu ces capacités doivent intégrer de manière cohérente et réaliste le processus de conflit et en même temps permettre de définir la méthode de résolution, éventuellement les conséquences de réussite et d’échec et favoriser la cinématique de l’action. C’est une vraie bonne idée, particulièrement dynamique.

A tout cela s’ajoute des modificateurs très simples mais là encore assez malins (vu plus haut par exemple le malus de « -10 à -20 » si votre capacité a une description trop vague ne permettant pas d’affiner la logique narrative de l’action). Le jet d’un D100 se cumule alors aux modificateurs et l’on compare les deux sommes obtenus entre les protagonistes. Là encore on évite le calcul mental trop complexe car le premier niveau de réussite correspond à un différentiel de 1 à 9, le second de 10 à 99 et le troisième de 100 et plus. Ces écarts sont donc très aisés à calculer.

Le perdant subit donc une faiblesse/désavantage qui est notée immédiatement et dont le niveau est égal au niveau de score de base du vainqueur (score sans le jet du D100). Cette faiblesse entrera en jeu selon le contexte et appliquera son niveau en tant que malus. C’est là encore simple, élégant et plutôt parlant. Un succès critique induira pour le perdant en plus de ce malus une restriction totale sur une ou plusieurs capacités. Inversement au lieu de donner un désavantage au perdant, c’est le gagnant qui peut obtenir un avantage au travers d’une capacité nouvelle.

Sur un succès mineur les avantages/désavantages disparaissent rapidement (fin de la scène d’action, un bandage rapide, repos d’une heure, etc ...), sur un succès standard cela demandera une procédure particulière (soins élaborés ou magiques, heures ou jours, outillage ...) ou un temps plus long et sur un succès critique la capacité est permanente et ne pourra disparaître que selon des conditions très spécifiques.

Ce système laisse beaucoup de libertés au MJ, mais les conséquences de tout conflit sont de toutes manières décidées avant de jouer le dit conflit : pas de mal entendu donc quant au résultat. A noter qu’une variation permettant de morceler le conflit en sous-conflits jouant sur les rebondissements existe et fonctionne sans à-coup. Un autre point notable confortant le grand nombre de capacités définissant un personnage, veut que l’échec dans l’utilisation d’une capacité induise l’utilisation d’une autre capacité pour résoudre le conflit. C’est malin et oblige le joueur à se creuser les méninges. Ainsi passera-t-on d’un objectif de « blessure à l’épée » pour vaincre son adversaire à une tentative d’« assommer » ou « de fuite ». Les conflits s’enchaînant dans ce cas avec de nouvelles opportunités d’action, de réaction ou d’histoire.

Autre mécanique très intéressante : la possibilité de jouer globalement les conflits en un seul jet de dés après une description des actions et objectifs de la scène ou de découper la scène en plusieurs sous-conflits (un tour par tour finalement) notamment face au Boss principal nécessitant la construction d'un suspens impactant l'ensemble des joueurs. La possibilité donc d'accélérer ou de ralentir les moments de conflits.

Pour autant vous ne trouverez pas de listes d’armes et de dégâts chiffrés, ni d’armures et de niveaux de protection. Le MJ appréciera éventuellement un rapport de force déséquilibré en usant d’un modificateur. C’est certainement le point le plus déroutant et le plus compliqué à gérer au début avec des joueurs habitués à quantifier mathématiquement les effets.
Là encore, l’on peut très facilement utiliser des tables de localisation et de niveaux de dégât (comme celles de Rolemaster par exemple) pour organiser les résultats d’un combat physique et flatter les « grosbillisme » de certains. Gardez à l’esprit que le système étant très pur, il accepte pas mal de « plug-ins » permettant de se sentir plus à l’aise durant la prise de décisions.

3) - COUP DE PROJECTEUR.


Les points nommés « spotlight » présentent un concept commun à bien d’autres systèmes. Ces points permettent d’infléchir le destin des personnages ou du jeu. Leur utilisation est cependant assez amusante. Par exemple, on peut inverser la polarité du D100 ou bien ajouter des capacités supplémentaires à son score dans un conflit ou encore faire monter les enchères dans un conflit. Ils permettent également de modifier son personnage, de le faire progresser ou de le « réparer ». Nous sommes certes en terre connue mais cela fonctionne admirablement.

4) - DIVERS.

Parmi les autres qualités du système, il faut retenir le traitement des « compagnons/sidekick ». Leur création est à nouveau simple et rapide. On aimera ou l’on détestera l’idée que les armes et armures n’ont pas vraiment d’influence sinon pour déterminer le type de conflit, les conséquences attendues et le type de désavantages que cela entraînera. Les Pnjs de type « chair à canon » sont intégrés dans les règles de manière à concentrer et à fluidifier le combat. Des exemples de conceptions de PnJs tels que des villes, des organisations, des objets, des univers sont disséminés dans l’ouvrage et permettent de comprendre les infinies possibilités du moteur d’Other Worlds. On regrettera peut être l’absence d’un petit bestiaire afin de facilité la compréhension des niveaux de puissance, ou encore d’exemples plus nombreux concernant les pouvoirs. On notera enfin les points de « feedback » que les joueurs se donnent entre eux pour se féliciter et que l’on peut transformer en « spotlight ».

5) - OTHER WORLDS SE DOMPTE.

Oui ! Le système n’est pas facile à appréhender car très ouvert et laissant une grande latitude de description et de décision au MJ et aux joueurs. La mécanique est ultra simple et laisse une grande liberté pour définir les conséquences des actes de chacun. C’est bien là, un aspect qui rebutera les MJs et les joueurs préférant les systèmes mécaniques, très cadrés, documentés, quantifiés où les règles prévoient tous les cas en permettant d’appliquer des résultats chiffrés. Pour autant Other Worlds chiffre en permanence les conséquences mais ces dernières sont concertées et totalement renouvelables et originales. Si les joueurs se prêtent au jeu, la vie du jeu s’en trouve grandie et l’imaginaire magnifié.

6) - CONCLUSION.

Vous l’aurez compris, Other Worlds s’apparente à un coup de coeur, une bouffée d’air frais soufflée par un équilibre parfait entre simulation et narration. Objectivement, le système conserve encore quelques légères zones floues ou du moins qui mériteraient des précisions et exemples supplémentaires. Mais l’esprit est là. Other Worlds présente l’avantage d’un système polyvalent et adaptable très rapidement sans perdre un bon niveau de simulation. Bien maquetté, joliment illustré, ce système privilégiant la narration et les échanges interactifs n'a absolument pas connu de réel succès. Il mérite pourtant que l’on s’y attarde et très certainement une V2 gommant certains flous.
Dernière modification par ypikaye le ven. juil. 29, 2016 9:15 pm, modifié 1 fois.
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Fabfab
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Re: Critiques

Message par Fabfab »

Détaillé et fort intéressant. Il me semble que certains ici avaient déjà parlé de ce jeu, qui à l'époque m'avait beaucoup fait penser à HeroQuest 2. Ta description renforce cette impression, sur tous les points!
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Re: Critiques

Message par Trickster »

Fabfab a écrit :Détaillé et fort intéressant. Il me semble que certains ici avaient déjà parlé de ce jeu, qui à l'époque m'avait beaucoup fait penser à HeroQuest 2. Ta description renforce cette impression, sur tous les points!
De mémoire les créateurs de OtherWorlds ont bossé sur HQ2, ceci expliquant sûrement cela...
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Re: Critiques

Message par ypikaye »

Effectivement, difficile de départager HQ et OW, chacun titillant à des endroits divers mes affinités rôlistes.

Ainsi j'avoue une réelle attirance pour la conception et la présentation des personnages d'Other Worlds, ainsi que pour le D100. D'un autre côté j'aime beaucoup la logique de niveau de maîtrise d'Heroquest permettant une résolution élégante et rapide des conflits, de même que la gestion des sidekicks.

Je pense que si Heroquest V2 avait été mieux maquetté et écrit, rendant ainsi sa lecture et sa compréhension nettement plus digeste et rapide, soutenu non pas essentiellement par un univers imposant et intimidant comme Glorantha, il aurait pu prendre le dessus sur Fate V3 auquel même par la force de son succès, je n'arrive pas a accrocher totalement.

Other World de mon point de vue possède des très grandes qualité dans la création de persos, dans sa présentation et sa rédaction, mais pêche sur certains flous artistiques induits par son côté narrativiste et parfois freeform. Il n'en demeure pas moins que, pour ma part, la petite dizaine de parties "Pulp", univers Bob Morane - année 50/60 version OW a toujours été très plaisante, animée, riche en narration, suspens et rebondissement induit par le système.
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Nébal
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Re: Critiques

Message par Nébal »

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Lu 6 Voyages en Extrême-Orient, un recueil de scénarios adoptant un cadre japonais, qu'il soit réaliste ou fantastique - médiéval, par contre, en tout cas antérieur à Meiji.

Complété par un système d'une extrême simplicité, le "D6 Light", même si absolument rien n'impose d'en faire usage.

Fort sympathique, j'ai bien envie d'en tester un ou deux...
Spoiler:
La gamme « 6 Machins » ou « 6 Trucs » des XII Singes consiste en bouquins assez brefs explorant des thématiques variées, du space op’ à l’horreur halloweenesque, et proposant chaque fois six scénarios conçus a priori pour être des one-shots. Dans le cas présent, nous avons donc droit à 6 Voyages en Extrême-Orient… titre un peu trompeur dans la mesure où l’Extrême-Orient, ici, est systématiquement le Japon. En même temps, c’était tant mieux pour moi… Ayant trouvé le bouquin en soldes, je me suis dit que ça pouvait valoir le coup d’y jeter un œil.

Ces scénarios ne se réfèrent pas outre mesure à un système de jeu particulier, ils sont supposés être assez souples pour s’adapter facilement au système que le MJ et les joueurs souhaitent employer – toutefois, ces petits bouquins comprennent, au cas où, les règles du « D6 Light » (« notre version ultra-rapide du D6 »), un système d’une extrême simplicité (je viens de m’en constituer un petit résumé, ça fait moins d’une page en comprenant la création de personnages)… mais dont la présentation, en l’état, souffre quand même d’un fâcheux défaut de relecture (c’est vrai, hélas, du reste de ce petit ouvrage, où les coquilles abondent, et parfois les renvois foireux, mais c’est sans doute ici que c’est le plus gênant). La condensation du système au plus bref n’en rend pas toujours la lecture très claire, et, parfois, il m’a fallu m’y reprendre à deux ou trois fois afin de comprendre ce que tel paragraphe court mais abscons impliquait au juste. Le plus embêtant, toutefois, ce sont probablement les oublis… Il en est un, p. 66, qui me laisse encore perplexe – un paragraphe expliquant qu’un résultat de 1 sur le dé libre équivaut à un échec automatique, et même un échec critique ; jusqu’ici, OK… Mais il est précisé qu’un résultat de 2, 3, 4 ou 6 n’a pas d’effet spécial. Bon. Très bien. Mais… Euh, qu’en est-il du 5 ? Est-ce un score sans effet particulier comme les autres, simplement oublié ici ? Ou bien est-ce une réussite critique – notion qui apparaît p. 67 au détour d’un paragraphe portant sur l’utilisation des points de personnage ou PP, mais sans la moindre explication supplémentaire ? Et du coup, est-ce que ça a des implications particulières, une réussite critique ? Je veux dire, au-delà de la réussite automatique ? Et, euh, tant qu’on y est, pourquoi le 5 et pas le 6, dans ce cas ? Bon… Je suppose qu’il y a moyen de s’en tirer, mais… Bon. Plus loin, un autre petit souci concernant les combats : on nous parle, p. 69, d’un « tableau des blessures », et sur la même page figure un « tableau des niveaux de blessure » ; sauf qu’on a du mal à corréler les deux… Et pour cause : le « tableau des blessures », que je cherchais désespérément, est tout autre, et n’apparaît nulle part dans cette exposition du « D6 Light » ; on le trouve bien dans le livre, pourtant… mais tout rikiki en bas de la fiche de personnage vierge, p. 80 ! Bon, OK, il est là, c’est déjà ça ; et je suppose qu’il permet ensuite de se reporter au « tableau des niveaux de blessure », même si, là encore, ça n’est pas toujours forcément très clair… Bref. Un peu d’application aurait été appréciable. Quant à la pertinence du système, je ne me sens pas vraiment de la juger sans l’avoir pratiqué ; ça a l’air de tourner… C’est surtout très simple. J’ai l’impression que les scènes d’action peuvent être assez violentes, mais faut voir.

L’essentiel est de toute façon ailleurs, avec ces six scénarios nippons, globalement assez variés – il y a de l’action, de l’enquête, du social… Du réaliste, du fantastique… Du « classique », du plus innovant… Une chose tout de même : ils adoptent tous le cadre d’un Japon médiéval, si cela peut recouvrir bien des périodes différentes – on n’y trouve en tout cas rien de contemporain, ou même simplement postérieur à Meiji. Ces scénarios sont par ailleurs plutôt de bonne tenue dans l’ensemble – rien de transcendant, mais des choses efficaces, parfaites pour couper un peu le rythme d’une campagne et en éviter la monotonie (et c’est bien de la sorte que j’envisage de m’en servir). Un petit regret, toutefois : le caractère éventuellement « sur le pouce » de ces scénarios aurait sans doute bénéficié de quelques prétirés dans le système « D6 Light »… Mais il est vrai que la création de personnages semble pouvoir être pliée très vite, alors admettons…

Et voyons maintenant les scénarios, dans l’ordre de leur apparition. Avec une précision : le cas échéant, je vais être amené à SPOILER un peu, et donc prudence…

Le premier de ces scénarios, « Le Dieu pâle », est signé Vivien Féasson (auteur dans le genre nipponisant du jeu Les Errants d’Ukkiyo, que je devrais lire prochainement) ; c’est hélas celui qui m’a le moins plu, et de loin… au point de me faire craindre pour la suite. Non qu’il soit véritablement mauvais ; c’est surtout qu’il est bien trop convenu (dès son départ au-delà des limites de la caricature : « Vous êtes dans une auberge quand soudain un malentendu… »), et manque peut-être aussi de liant (les PJ fuient, tombent sur quelque chose qui n’a rien à voir, doivent ensuite fuir à nouveau ou combattre leur menace initiale), et probablement d’une certaine vraisemblance (ce village caché, je ne parviens pas à y croire). C’est d’autant plus regrettable que le thème – celui des chrétiens cachés durant l’Ère Edo, avec de possibles et amusantes déviations du credo – a tout pour être intéressant… Au mieux, on retirera de ce scénario l’occasion d’un ou deux dilemmes – mais sans rien de bien enthousiasmant, décidément.

Le deuxième scénario est à n’en pas douter très classique également – trop, peut-être ? Mais pas pour moi : en dépit de son titre parfaitement argh !, « Lame, l’arme, larmes », signé Fabien Fernandez, s’avère un bel exemple d’efficacité – c’est sans doute un scénario idéal pour initier des joueurs débutants, d’ailleurs, même s’il a suffisamment d’intérêt au-delà pour satisfaire pleinement une table plus expérimentée. Ce scénario fait cette fois intervenir le surnaturel – d’abord via un sabre maudit dont héritent les PJ, ensuite via des esprits et autres fantômes joliment nippons. Les événements présents sont régulièrement mis en corrélation avec un passé tantôt historique, tantôt mythique, ce qui confère à la narration une profondeur temporelle appréciable, et la rend du coup plus « concrète » et « vivante » ; par ailleurs, le scénario se montre assez équilibré entre l’action (dont une scène de bataille propice aux mouvements épiques) et l’enquête, et offre aux joueurs de belles rencontres et quelques énigmes à la résolution tout à fait réjouissante. Par contre, ce scénario me paraît plus long que tous les autres figurant dans le recueil – à mon rythme de jeu, ce one-shot, en fin de compte, me paraît bien pouvoir s’étendre utilement sur deux ou trois séances. C’est quoi qu’il en soit celui que j’ai le plus envie de faire jouer – d’autant plus sans doute que l’action n’est pas mon fort, et que j’ai envie de travailler cette dimension du jeu de rôle.

« Le Cortège au cent démons », de Guylène le Mignot, s’inscrit finalement dans une veine assez proche : cadre japonais largement imprégné de surnaturel, mélange d’enquête et d’action, relative profondeur temporelle. Son point de départ est assez amusant, avec cette cérémonie d’inauguration d’une statue de bouddha tournant au miracle… ou à la farce. La conclusion, avec son assemblée de démons plus ou moins surréalistes, a de quoi faire flipper un brin, sans doute ; entre les deux, toute fois, c’est peut-être un peu terne – à mes yeux du moins, et notamment en comparaison avec le scénario précédent. Ça demeure plus que correct.

Nicolas Heitz livre ensuite « Le Secret de Musashi » – oui, le Musashi, Miyamoto Musashi, le plus grand escrimeur de son temps, et l’auteur du Traité des Cinq Roues (que je lis prochainement, d’ailleurs – il serait temps…) ; et cette inscription historique via une célébrité n’est sans doute pas pour rien dans l’intérêt du scénario. Ceci étant, si le grand sabreur y figure (enfin… d’une certaine manière, disons), le scénario relève bien plus de l’enquête que de l’action ; et c’est une enquête globalement amusante, avec quelques personnages potentiellement hauts en couleurs… J’aime bien ; rien de transcendant, mais c’est bien fait.

Même chose sans doute pour « Un amour d’ogre », de Jean-Baptiste Lullien – s’il ne figure pas parmi ceux que j’envisage de faire jouer, ce n’est pas du tout parce qu’il serait « mauvais », ni même véritablement « moins bon » : c’est surtout qu’il implique un ton très particulier, qui en fait toute la saveur, mais que je ne me sens pas vraiment de mettre en scène pour ma part… On y retrouve l’élément surnaturel, mais avec une distinction essentielle – le propos a quelque chose de farfelu et d’humoristique qui tranche (heureusement, sans doute) sur la plupart des autres scénarios du recueil (en fait, il peut sans doute y avoir des éléments humoristiques dans « Le Secret de Musashi », voire dans « Lame, l’arme, larmes », mais ils sont épars et plus « pondérés »). L’assistance de l’ogre amoureux de la veuve aux bons petits plats passe par quelques épreuves et énigmes qui peuvent s’avérer amusantes, à condition toutefois de bien intégrer le ton particulier de la narration – ce qui n’est sans doute pas donné à tout le monde, et probablement pas à moi.

Reste « Mourir dignement » de Jérôme « Brand » Larré (auteur de Tenga, qu’il faudrait sans doute que je relise, tant je crains d’être complètement passé à côté), qui affiche d’emblée sa singularité en adoptant un format un tantinet différent de tous les autres scénarios du recueil, et en imposant d’emblée des « contraintes » qui renforcent encore son caractère à part : les PJ sont tous des ninjas, et comptent venger la destruction de leur village (en l’occurrence par Oda Nobunaga – là encore, on croise un fameux personnage historique… même si le portrait qui en est fait me laisse passablement perplexe, au mieux : on ne fait pas exactement dans le mythique et « bigger than life ») ; dès lors, précision essentielle, il ne s’agit certainement pas pour eux de triompher et survivre, mais, conformément au titre, de « Mourir dignement ». Et ce cadre global passe par un certain nombre de particularités relevant tant du système (la règle de l’alerte, pertinente) que de la narration (les épilogues, que j’aime vraiment beaucoup)… avec entre les deux une variante « abstraite » de « donjon », où le traditionnel plan est remplacé par une sorte de schéma des rencontres utiles, que je ne suis pas bien certain de pleinement comprendre – et sans doute est-ce pour cela que son utilité me laisse encore perplexe. Mais il y a sans doute quelque chose à creuser là-dedans – y réfléchir ne mange pas de pain…

Bilan plus que correct ; ces scénarios ont tous leur intérêt (même si le premier me paraît donc un bon cran en dessous), et j’ai bien envie d’en tester un ou deux (ou trois). Pas totalement sûr du système à employer (je me suis demandé, notamment, si FATE Accelerated…) ; mais je suppose que tester ce « D6 Light » ne coûte rien. On verra…
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Nébal
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Mon retour sur le Manuel de la Guilde Spatiale, pour Imperium.

Il arrive un peu tard pour moi, mais il est chouette.
Spoiler:
Dernier petit supplément en date pour Imperium, ce Manuel de la Guilde Spatiale arrive peut-être un peu tard en ce qui me concerne, dans la mesure où j’avais déjà conféré à la Guilde un rôle important dans ma chronique. Inévitablement, il en résulte des « incohérences » : certains aspects de la Guilde tels qu’ils sont développés ici rendent moins logiques certains de mes choix, au point parfois de générer après coup des incompatibilités. Des choses pas bien graves le plus souvent, parfois plus gênantes… Des choses que l’on peut encore tordre pour rétablir la cohérence globale, d’autres pour lesquelles c’est peine perdue… La chronique étant en cours, je ne vais pas me montrer plus précis dans ce bref retour. Mais peu importe : il n’en reste pas moins que c’est là un supplément tout à fait bienvenu, et qui sera sans doute utile dans bien des parties d’Imperium.

C’est que la Guilde constitue un des plus grands secrets de l’univers de Dune – avec bien sûr l’épice, mais justement : les deux sont intimement liées… La dimension « secrète » de ce supplément en réserve bien sûr la lecture aux maîtres de jeu (je vais me restreindre, mais il y aura peut-être quelques rares SPOILERS dans ce qui va suivre – autrement dit : OUSTE, LES/MES JOUEURS !) ; et, pour une fois, ou disons de manière plus marquée que souvent (la principale exception jusqu’à présent étant probablement le Manuel du Bene Tleilax), le livret contient bien des choses qu’un fanatique de Dune ne connaîtra pas pour autant. En effet, si le supplément puise comme d’habitude à la source ultime qu’est le cycle de Frank Herbert (reléguant les sagouineries du fiston dans les oubliettes les plus obscures), et le cas échéant dans la Dune Encyclopedia, il reste cependant bien des éléments encore trop flous dans la perspective d’un tel guide – d’où des apports personnels, parfois spécifiés comme « apocryphes », et dont l’utilisation est laissée à la discrétion des joueurs. En ce qui me concerne, ces apports me paraissent bienvenus le plus souvent – le « réseau-conscience », par exemple –, et tout particulièrement sans doute quand ils éclairent l’histoire de la Guilde.

Car la Guilde n’est pas liée qu’à l’épice : elle est – ou elles sont ensemble – la condition sine qua non de l’existence même de l’Imperium (le monopole sur les voyages interstellaires, et le monopole bancaire qui l’accompagne, justifient son pouvoir immense, ne pouvant être adapté aux cadres classiques de la société galactique ; la Guilde est un pouvoir autre et – personne n’en doute et certainement pas l’Empereur – un pouvoir par essence supérieur). On le sait, le calendrier de l’Imperium a pour point de départ la fondation (supposée) de la Guilde – en fait sans doute plus exactement sa « reconnaissance », car il y avait une pré-Guilde dont le rôle a été essentiel dans la politique galactique d’alors, déterminant celle des 10 000 années à venir. Revenir sur cette histoire, c’est aussi lever le voile sur quelques mystères de l’univers de Dune, et non des moindres, et qui pour certains m’embarrassaient pas mal : ainsi, le voyage interstellaire étant basé sur le mélange, comment un pré-Imperium a-t-il pu se développer avant la Guilde, et donc avant les navigateurs repliant l’espace ? L’explication réside dans ce fait qu’il existait déjà des moyens – technologiques, quant à eux – de faire des voyages interstellaires, et sans s’embarrasser de la limite ultime de la vitesse de la lumière, via déjà une sorte d’hyperespace. Seulement ces voyages étaient longs, aléatoires, voire dangereux… Du coup on comprend ainsi comment un embryon d’empire galactique a pu se développer avant la Guilde, tout en justifiant pleinement son rôle essentiel à partir de là. Ce qui a en outre des conséquences sur le long terme, toujours sensibles 10 000 ans plus tard : par exemple, les fondateurs de la Guilde ont beau être à l’origine des exilés ixiens, leurs descendants n’en sont pas moins extrêmement hostiles à la science d’Ix – redoutant que de nouvelles « machines pensantes » puissent remplir la fonction des Navigateurs, et mieux encore si ça se trouve… D’où le conservatisme acharné de la Guilde, qui n’est pas le moindre soutien des interdits du Jihad Butlérien. Cette méfiance, voire cette hostilité, s’étend bien sûr pour les mêmes raisons au Bene Tleilax… même si, dans le cadre de la politique classique de l’Imperium, c’est peut-être bien malgré tout le Bene Gesserit qui constitue la Némésis de la Guilde ; et que les deux institutions prisent autant le secret et les plans à très, très long terme n’y est bien sûr pas pour rien.

L’histoire de la Guilde est aussi l’occasion de développer des lieux bien particuliers : les Jonctions sont à peine esquissées, les long-courriers forcément un peu plus, mais c’est surtout ici le havre de Tupile qui ressort, dont personne en dehors de la Guilde ne connaît la localisation, voire simplement l’existence. Un cadre intéressant… mais à manier avec précaution, bien sûr.

Enfin, les secrets de la Guilde sont aussi largement d’ordre technologique (NT X) – occasion de revenir sur l’invention apocryphe du commorium (déjà évoqué dans le supplément Maison Moritani), même si, dans ses implications, je trouve a priori qu’il ressemble en fait un peu trop à l’épice pour constituer une véritable alternative ; c’est à débattre, j’imagine…

La structure hiérarchique et administrative de la Guilde, complexe, est détaillée par le menu. Elle fournit un cadre de choix pour bien des secrets, et regorge de pistes d’aventures…

Mais il s’agit d’aventures au sein même de la Guilde. Celle-ci est trop hors-normes pour qu’un personnage guildien, quel qu’il soit, puisse vraiment intégrer le traditionnel Jeu des Maisons d’Imperium. Dès lors, si l’on trouve ici des règles pour la création de personnages guildiens (y compris les Navigateurs eux-mêmes, bien qu’ils soient évidemment injouables, n’ayant plus rien d’humain et étant confinés dans leurs cuves…), c’est dans une perspective déjà évoquée plusieurs fois dans la gamme, remplaçant le Jeu des Maison par un Jeu des Chapitres (Bene Gesserit), un Jeu des Sietch (Fremen), voire un équivalent tleilaxu, etc. : c’est une tout autre perspective de jeu, centrée sur ces organisations et secrets particuliers, et impliquant que tous les joueurs soient guildiens (ou tous Bene Gesserit, ou tous Fremen, ou tous Tleilaxu…). L’idée séduira plus ou moins, fonction des intérêts et intensions de chacun, mais il y a très certainement de la matière.

Quoi qu’il en soit, les Navigateurs eux-mêmes étant hors de propos, les joueurs incarnent dans une telle chronique des Agents et Émissaires – pleinement guildiens, mais aussi parfaitement humains, s’ils peuvent régulièrement être assimilés à des Mentats particuliers (créés en dehors de l’ordre des Mentats, d’où des tensions). Le Conditionnement guildien joue à vrai dire un grand rôle dans cet esprit, si les Vocations proposées sont plus variées ; je redoute quand même à vue de nez que des personnages conçus dans cet esprit se ressemblent un peu trop… Mais c’est à vue de nez, et je dis sans doute des bêtises. Quoi qu’il en soit, c’est là un cadre de chronique pouvant s’avérer tout à fait palpitant, où le jeu politique habituel d’Imperium prend peut-être des teintes plus sombres et machiavéliques encore, d’espionnage et de conspirationnisme…

Une annexe enfin sur la classification planétaire selon la Guilde – complexe, distinguant une vingtaine de types planétaires. Un peu gadget sans doute, mais de ces gadgets qui peuvent en fait avoir des conséquences insoupçonnées et autrement enthousiasmantes que ce que l’on pourrait croire au premier abord.

Un bon supplément, donc. Il faut comme souvent le manier avec précaution, tant il peut perturber la dynamique d’une chronique d’Imperium, mais c’est vrai de bien d’autres, et globalement ça vaut sans doute le coup.
Welcome to Nebalia : Crypt of Cthulhu, Vol. 1, No. 2
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