Suite de l'épisode Un Noël à Manille
Un vol pour le Nord
Décidés à retrouver le propriétaire terrien
Matias del Rosario, qu'ils soupçonnent d'être un
Aswang, les PJ retournent au bout de quelques jours chez l'
albularyo Andrès Kalaw. Ce dernier leur a préparé une fiole d'huile qui doit bouillir quand on l'approche d'un Aswang, ainsi qu'une cravache faite à partir d'une queue de raie, seule arme efficace contre le monstre. Enfin, il leur remet un talisman (
anting-anting) pour s'en protéger, mais destiné avant tout aux femmes enceintes.
Ainsi parés à affronter l'Aswang, le Lieutenant-Commander
Packard, le professeur
Bolgenstein et
Guus Van Diemen embarquent à bord de leur
Martin M-130, en direction du nord de l'île de Luçon. Après quelques heures de vol, ils amerrissent en baie de Vigan, le port le plus proche de San Quintin, où vit Rosario.
A Vigan
Vigan est une vieille ville paisible, au charme hispanique désuet. Les PJ y passent la soirée, dînant dans un restaurant du port où on leur parle de l'excellente réputation de la fabrique de cigares Rosario.
A la nuit tombée, ils se rendent dans le quartier du port, où le professeur Bolgenstein retrouve un de ses contacts peu recommandables, un employé de taverne nommé
Ignacio. Ils lui demandent de les mettre en relation avec une prostituée,
Lucilia, dont le témoignage a été consigné par l'anthropologue
Henri Otley Beyer, en tant que victime d'un Aswang.
Les PJ sont conduits chez Lucilia, une femme d'âge mûr, désormais, qui les accueille dans sa cuisine, et propose à Packard les services de l'une de ses nièces. Ayant dissipé le malentendu, le pudique officier l'encourage à raconter son histoire. Elle fait le récit de l'expérience traumatisante que fut la perte de son enfant, et explique que d'autres prostituées de la ville ont subi le même sort au cours des dernières années. La dernière a été frappée au mois de mars 1937, et certaines sont même mortes des suites de l'hémorragie.
Dès le lendemain, les PJ envoient un télégramme à Matias del Rosario, pour demander à le rencontrer, sous le prétexte de possibles accords commerciaux avec la société d'import-export de Guus Van Diemen. Ils louent ensuite une voiture avec chauffeur, pour se rendre au village de San Quintin.
La route de San Quintin
Sur la longue route cahotante qui les conduit vers la montagne, les PJ ont tout le temps de discuter avec
Uberto, leur chauffeur. Celui-ci leur parle de Matia del Rosario, un homme bon et généreux, qui fait vivre une grande partie des habitants de San Quintin et des paysans des environs avec sa fabrique de cigares. Il leur offre des salaires très corrects, les aide en cas de difficulté, et tout le monde semble l’apprécier.
Alors que la voiture traverse une forêt, Uberto coupe soudain le moteur. Il a repéré, un peu plus loin, au bord de la route, un petit groupe de chasseurs à l’affut. Ce sont des
Tinguians, une peuplade traditionnelle et animiste. Uberto explique qu’une tribu vit sur les hautes terres proches de San Quintin. Aujourd’hui, ils sont pacifiques, mais ils étaient encore considérés comme des chasseurs de tête il y a une dizaine d’années. Quoiqu’il en soit, le chauffeur préfère éviter de les mettre en colère en troublant leur chasse.
Poussé par son instinct d’anthropologue, le professeur Bolgenstein descend de la voiture pour rejoindre les Tinguians alors qu’ils s’enfoncent dans la forêt. Connaissant quelques rudiments de leur dialecte, il se présente en ami. Il leur dit aussi qu’il est venu détruire un Aswang, et qu’il lui faudrait de l’aide pour y parvenir.
Le jeune homme qui dirige le groupe de chasseur,
Bagbagak, paraît intéressé, car sa tribu est aussi victime de l’Aswang. Il propose à Bolgenstein de venir dans les prochains jours dans son village, pour rencontrer le chef
Bayanai, qui est aussi son beau-père, afin de discuter de ce sujet avec lui. Le professeur accepte la proposition, et rejoint ses amis.
Chez Matias del Rosario
Après avoir quitté la forêt, la voiture traverse les champs de tabac de la Cordillère Centrale, et atteint le petit village de San Quintin. Mais les PJ ne s’y arrêtent pas, et se rendent directement à la propriété Rosario. Ils sont reçus par une vieille servante, qui les fait entrer dans la magnifique hacienda.
Le maître des lieux les reçoit aimablement. S’il ne cache pas sa surprise de leur visite impromptue, il se dit ravi de les accueillir, et prêt à discuter de transactions commerciales.
Au souper, Matias del Rosario présente aux PJ son neveu,
Adrian de la Cruz. Veuf et sans enfant, Rosario a choisi le jeune homme comme héritier, et a entrepris de le former à sa succession.
A table, la discussion est très cordiale. Guus Van Diemen envisage avec son hôte un partenariat, afin d’exporter une petite quantité de cigares Rosario, en tant que produits de luxe, aux Indes néerlandaises, ou même jusqu’aux Pays-Bas.
Après le repas, les PJ accompagnent Matias del Rosario à San Quintin, pour assister à un bal populaire, pour la nuit de la Saint-Sylvestre. Ils constatent l’attachement de la population locale au propriétaire terrien, qui se montre très aimable avec eux.
Le lendemain matin, ils vérifieront la bonne réputation de Rosario en le voyant participer à une procession, au cours de laquelle il porte un lourd brancard surmonté d’une statue de la Sainte-Vierge, attestant ainsi de sa ferveur religieuse.
Malgré cette image sans tache de Matias del Rosario, les PJ ont pu s’assurer pendant la nuit, en approchant la fiole d’huile enchantée de la porte de sa chambre, qu’il était bien l’Aswang.
Jonathan Packard et Guus Van Diemen se posent donc un cas de conscience : doivent-ils s’attaquer à cet homme honorable et aimé de tous le jour, mais qui se comporte certaines nuits en monstre sanguinaire ?
Le village tinguian
De son côté, le professeur Bolgenstein reste inflexible. Au matin, il trouve un paysan local pour le guider, et part à pied vers les hautes terres, pour rejoindre le village tinguian.
Après plusieurs heures de marche harassante, il est accueilli sans hostilité par les indigènes. Le jeune Bagbagak le conduit jusqu’à la hutte du chef Bayanai, qui accepte de recevoir l’anthropologue. Ce dernier rencontre aussi la belle
Marikit, fille du chef et épouse de Bagbagak, et constate qu’elle est enceinte de plusieurs mois.
Cette grossesse explique certainement que Bayanai soit sensible à la demande d’aide de Bolgenstein. En effet, l’Aswang, qui semble choisir ses victimes parmi les pécheresses étrangères à San Quintin, n’hésite pas à s’en prendre aussi aux Tinguians animistes. Bayanai s’inquiète donc logiquement pour sa fille, mais il reste prudent : il est hors de question que ses guerriers aillent tuer Matias del Rosario sur ses terres, ou puissent être soupçonnés d’être mêlés à sa mort, car il sait que les représailles sur sa tribu seraient terribles.
Bolgenstein propose alors d’attirer l’Aswang au village, pour le tuer avant qu’il n’agresse la fille du chef. Bayanai hésite, mais la courageuse Marikit le convainc d’accepter, afin que leur tribu soit définitivement débarrassée de cette menace.
Bolgenstein donne donc rendez-vous aux Tinguians dans deux jours, puis reprend le chemin de San-Quintin.
Le piège
Le 3 janvier, les PJ prennent congé de Matias del Rosario, non sans que Bolgenstein ait habilement glissé une allusion à la grossesse de la fille du chef Bayanai.
Reprenant la route avec leur chauffeur Uberto, les PJ se font déposer en pleine forêt, et continuent à pied jusqu’au village tinguian.
Une fois sur place, les PJ préparent leur plan avec leurs nouveaux amis. Ils remettent à Marikit le talisman pour se protéger de l’Aswang, et le flacon d’huile pour qu’elle puisse signaler son arrivée, tandis que Bagbagak reçoit le fouet en queue de raie qui servira à le tuer. La jeune femme est placée dans une hutte en hauteur au centre du village. Les guerriers et les PJ se cachent aux alentours, prêts à se précipiter sur l’Aswang dès qu’il arrivera.
Une fois le piège tendu, le groupe attend pendant une partie de la nuit, à l’affût du moindre bruit. C’est à l’heure la plus sombre que la silhouette d’une grande roussette vient se poser sous la hutte de Marikit. Un instant après, c’est un grand chien jaune qui se tient au même endroit, pointant son museau vers le plancher de bambou.
Un cri d’alarme retentit, et les PJ, accompagnés des chasseurs tinguians, se précipitent sur la bête. Le professeur Bolgenstein parvient à s’emparer de la langue démesurée que l’Aswang est en train d’étirer. Il le retient tandis que ses compagnons criblent la créature de balles, et que Bagbagak le frappe à coups de cravache.
Au bout de quelques instants, le chien éreinté change à nouveau de forme : les PJ découvrent Matias del Rosario, nu, agenouillé et les mains jointes, en train de réciter un
pater noster. Bagbagak lève alors sa machette, et lui coupe la tête.
En examinant le corps, les PJ remarquent que son dos est strié de cicatrices anciennes. Ce sont les coups de discipline que Rosario, en fervent catholique, s’est infligé tout au long de sa vie en pénitence de ses crimes.
Les Tinguians se réjouissent de la mort de l’Aswang, et remercient chaleureusement les PJ (notamment Bolgenstein). Puis ils brûlent le corps de Rosario, s’accordant pour que personne ne parle de l’événement. Nul ne devra savoir comment le propriétaire terrien a pu disparaître au beau milieu de la nuit, sans laisser de trace.